Face au développement des locations de meublés de tourisme et aux difficultés du marché de la location de longue durée, certaines villes peuvent mettre en œuvre la législation du changement d’usage (art. L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation). Lorsque ce dispositif est mis en place par les collectivités compétentes, les loueurs doivent obtenir une autorisation de location en tant que meublé de tourisme au titre du changement d’usage.
Certains règlements de changement d’usage peuvent limiter le nombre de locations par loueur ou réduire la période de la location meublée durant l’année. D’autres règlements ont pour effet de restreindre, voire d’empêcher, l’activité de location meublée de tourisme avec la mise en place d’un système de compensation draconien.
Sans entrer dans le détail des modalités d’application de cette législation, il est à noter qu’un certain nombre de contentieux sont initiés soit par les collectivités à l’encontre des loueurs qui ne respectent pas la réglementation, soit par les loueurs eux-mêmes ou leurs organisations qui contestent le bien-fondé de la mise en place de cette législation.
1. Décisions contre la mise en place de la législation
Les deux ordonnances rendues par le tribunal administratif de Grenoble en date du 11 juillet 2023 illustrent justement le deuxième type de contentieux mentionné ci-dessus.
Saisi en référé, le tribunal administratif a prononcé la suspension de l’exécution des délibérations du conseil communautaire du Grand Annecy du 23 février 2023 approuvant les règlements fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage des locaux d’habitation en meublés touristiques de courtes durées sur le territoire de 27 communes de la Communauté d’agglomération du Grand Annecy.
Le juge des référés a prononcé la suspension de ces délibérations en considérant que deux moyens d’illégalité invoqués par les requérants étaient de nature à créer un doute sérieux quant à leur légalité :
– le premier tiré de ce que ces règlements sont applicables aux personnes morales et pas seulement aux personnes physiques ;
– le second tiré de ce que les demandeurs des autorisations doivent prouver que le changement d’usage est autorisé par le règlement de copropriété.
(V. les décisions sur le site internet du tribunal administratif de Grenoble)
Après cette première décision, il convient d’attendre la décision définitive du tribunal qui sera rendue sur le fond dans les mois à venir.
2. Décisions pour la mise en place de la législation
Par ailleurs, il convient d’évoquer le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 6 mars 2023 qui a confirmé la validité du règlement de changement d’usage adopté par la communauté d’agglomération Pays Basque applicable à compter du 1er mars 2023.
Le tribunal a tout d’abord estimé que la pénurie de logements destinés aux personnes souhaitant s’installer à l’année dans 24 communes membres de la communauté d’agglomération Pays Basque, situées en zone dite tendue, est suffisamment justifiée par les différentes données rassemblées, montrant que la demande de location de longue durée accessible à tous n’est pas satisfaite par l’offre existante. Selon le tribunal, cette situation justifie l’adoption de ce régime contraignant des locations de meublées de courtes durées.
De plus, le tribunal a considéré le système de compensation mis en place est suffisamment clair, transparent et proportionné à l’objectif recherché. Ce système ne méconnaît donc pas la directive européenne « Services » de 2006 et ne cause pas une atteinte excessive au droit de propriété.
(V. le jugement sur le site du tribunal administratif de Pau)
Il n’est pas inutile de rappeler que cette décision du tribunal administratif de Pau fait suite à une décision des juges des référés du 3 juin 2022 qui avait considéré que le règlement approuvé le 5 mars 2022, en tant qu’il impose aux personnes morales qui exercent leur activité dans le secteur de la location de courtes durées de meublés de tourisme de se soumettre, dès le 1er juin 2022, à un régime d’autorisation, selon des modalités particulièrement restrictives, sans être assorti de mesures transitoires, méconnaissait le principe de sécurité juridique.
Ayant considéré que la condition d’urgence était remplie pour une partie des requérants, les juges avaient suspendu l’exécution de la délibération du conseil communautaire de la communauté d’agglomération Pays Basque du 5 mars 2022 jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur sa légalité.
Entre-temps, la délibération a été modifiée pour ne pas être remise par le tribunal administratif.
Pour compléter l’information sur le sujet, voir sur internet :
–https://richeravocats.fr/reglementation-locations-meublees-de-tourisme-controle-juge-administratif/