La loi de finances pour 2024 comprend plusieurs dispositions qui concernent les loueurs de meublés de tourisme et les loueurs de chambres d’hôtes en matière d’imposition des bénéfices, de TVA et de droits de succession.
Ces mesures concernent plus précisément les différents points suivants : le régime fiscal des micro-entreprises (1), la modification du régime de TVA concernant les locations meublées (2), la refonte du régime de franchise en base de TVA (3) et la remise en cause du pacte Dutreil pour les locations meublées (4).
Nous publions les commentaires concernant ces mesures en 4 volets successifs.
Volet 1. La réforme ratée du régime du micro-BIC
La remise en cause du régime fiscal du micro-BIC applicable par les loueurs de meublés de tourisme est en gestation depuis plusieurs mois. A ce titre, l’article 45 de la loi de finances (LF) pour 2024 procède à une réforme fiscale du régime du micro-BIC concernant les revenus des locations de meublés de tourisme.
En raison d’un raté du Gouvernement, le texte législatif finalement publié comprend une sérieuse restriction du régime du micro-BIC.
Initialement, le Gouvernement avait présenté un amendement qui devait faire passer l’abattement de 71 % à un taux de 50 % dans les zones tendues (avec un plafond annuel de recettes de 77 700 €) et un abattement de 71 % dans les zones rurales (avec un plafond de recettes de 50 000 €) (V. notre article).
Du fait de l’adoption de la loi de finances par l’application de l’article 49 (alinéa 3) de la Constitution, le Gouvernement avait la main pour faire passer son amendement.
Tout cela était sans tenir compte de la faillibilité humaine qui par mégarde a laissé passer dans la mouture finale de la loi de finances pour 2024 les amendements très restrictifs du Sénat.
Pour des questions de procédure, la loi de finances a été définitivement adoptée avec ces mesures particulièrement restrictives, sans compter que ces dispositions devraient en principe s’appliquer sur les revenus de 2023.
Les amendements du Sénat ont pour effet que l’abattement de 71 % passe à 30 % dans les zones tendues et à 51 % dans les zones rurales avec de surcroît un plafond annuel de recettes de 15 000 € au lieu de 188 700 €.
Toutefois, selon la formulation finale (mais transitoire) de l’article 50-0 du CGI, il est permis de considérer que les locations de meublés de tourisme classés font toujours l’objet du plafond de 188 700 € (et non de 15 000 € comme mentionné ci-dessus qui ne viserait que les locations non classées). La question se pose de savoir quel serait l’abattement applicable pour les revenus des locations classées. D’aucuns avancent que l’abattement resterait à 71 % (certainement de façon provisoire).
Bref, tout cela est confus et fait pour le moins désordre. Il est donc urgent d’attendre une clarification.
Un certain nombre d’articles de presse rapporte que le Gouvernement va publier dans le courant du mois de janvier 2024 une instruction affirmant que la loi publiée au Journal officiel ne sera pas appliquée en l’état.
Par ailleurs, il est à noter que la réforme présentée ci-dessus ne modifie pas :
– le régime fiscal des loueurs de chambres d’hôtes qui relèvent du régime du micro-BIC avec un abattement de 71 % et un plafond annuel de recettes de 188 700 € ;
– le régime social des loueurs de meublés de longue durée soumis au régime du micro-BIC avec un abattement de 50 % et un plafond annuel de recettes de 77 700 € ;
– les règles d’affiliation sociale des loueurs de meublés de tourisme réalisant des recettes dont le montant annuel des recettes excède le seuil de 23 000 €.
Article 50-0 du CGI consolidé et modifié par la LF 2024
1. Sont soumises au régime défini au présent article pour l’imposition de leurs bénéfices les entreprises dont le chiffre d’affaires hors taxes, ajusté s’il y a lieu au prorata du temps d’exploitation au cours de l’année de référence, n’excède pas, l’année civile précédente ou la pénultième année :
1° 188 700 € s’il s’agit d’entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, à l’exclusion de la location directe ou indirecte de locaux d’habitation meublés ou destinés à être loués meublés, autres que ceux mentionnés aux 2° et 3° du III de l’article 1407 ;
« 1° bis 15 000 € s’il s’agit de la location directe ou indirecte de meublés de tourisme au sens de l’article L. 324-1-1 du code du tourisme
2° 77 700 € s’il s’agit d’autres entreprises.
Lorsque l’activité d’une entreprise se rattache aux deux catégories définies aux 1° et 2°, le régime défini au présent article n’est applicable que si le chiffre d’affaires hors taxes global de l’entreprise respecte la limite mentionnée au 1° et si le chiffre d’affaires hors taxes afférent aux activités de la catégorie mentionnée au 2° respecte la limite mentionnée au même 2°.
Le résultat imposable, avant prise en compte des plus ou moins-values provenant de la cession des biens affectés à l’exploitation, est égal au montant du chiffre d’affaires hors taxes diminué d’un abattement de 71 % pour le chiffre d’affaires provenant d’activités de la catégorie mentionnée au 1° et d’un abattement de 50 % pour le chiffre d’affaires provenant d’activités de la catégorie mentionnée au 2°. Ces abattements ne peuvent être inférieurs à 305 €.
Les plus ou moins-values mentionnées au cinquième alinéa sont déterminées et imposées dans les conditions prévues aux articles 39 duodecies à 39 quindecies, sous réserve des dispositions de l’article 151 septies. Pour l’application de la phrase précédente, les abattements mentionnés au cinquième alinéa sont réputés tenir compte des amortissements pratiqués selon le mode linéaire.
Les seuils mentionnés aux 1° et 2° sont actualisés tous les trois ans dans la même proportion que l’évolution triennale de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu et arrondis à la centaine d’euros la plus proche.
« Lorsque l’activité d’une entreprise se rattache aux trois catégories définies aux 1°, 1° bis et 2°, le régime défini au présent article n’est applicable que si le chiffre d’affaires hors taxes global de l’entreprise respecte la limite mentionnée au 1° et si :
« a) Le chiffre d’affaires hors taxes afférent aux activités de la catégorie mentionnée au 1° bis respecte la limite mentionnée au même 1° bis ;
« b) Et le chiffre d’affaires hors taxes afférent aux activités de la catégorie mentionnée au 2° respecte la limite mentionnée au même 2°.
« Le résultat imposable, avant prise en compte des plus ou moins-values provenant de la cession des biens affectés à l’exploitation, est égal au montant du chiffre d’affaires hors taxes diminué d’un abattement, qui ne peut être inférieur à 305 €, de :
«-71 % pour le chiffre d’affaires provenant d’activités de la catégorie mentionnée au 1° ;
«-30 % pour le chiffre d’affaires provenant d’activités de la catégorie mentionnée au 1° bis ;
«-50 % pour le chiffre d’affaires provenant d’activités de la catégorie mentionnée au 2°.
« Les plus ou moins-values mentionnées au huitième alinéa du présent 1 sont déterminées et imposées dans les conditions prévues aux articles 39 duodecies à 39 quindecies du présent code, sous réserve de l’article 151 septies. Pour l’application du présent alinéa, les abattements mentionnés aux huitième à onzième alinéas du présent 1 sont réputés tenir compte des amortissements pratiqués selon le mode linéaire.
« Les entreprises qui relèvent du présent régime bénéficient d’un abattement supplémentaire de 21 % pour le chiffre d’affaires afférent à leur activité de location de locaux classés meublés de tourisme mentionnés au 2° du III de l’article 1407, lorsque ces derniers ne sont pas situés dans des zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements, sous réserve que le chiffre d’affaires hors taxes, ajusté s’il y a lieu au prorata du temps d’exploitation au cours de l’année de référence, afférent à l’ensemble des activités de location de locaux meublés mentionnées au présent 1 n’excède pas au cours de l’année civile précédente 15 000 €. Le bénéfice de cet abattement supplémentaire est subordonné au respect du règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission du 18 décembre 2013 relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis.
« Les seuils mentionnés au présent 1 sont actualisés tous les trois ans dans la même proportion que l’évolution triennale de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu et arrondis à la centaine d’euros la plus proche. » ;
- Sont exclus de ce régime :
- Les contribuables qui exploitent plusieurs entreprises dont le total des chiffres d’affaires excède les limites mentionnées aux 1° bis et 2° 1° et 2° du 1, appréciées, s’il y a lieu, dans les conditions prévues au quatrième alinéa de ce même 1 ;
- (Abrogé) ;
- Les sociétés ou organismes dont les résultats sont imposés selon le régime des sociétés de personnes défini à l’article 8, à l’exception des sociétés à responsabilité limitée dont l’associé unique est une personne physique dirigeant cette société ;
- Les personnes morales passibles de l’impôt sur les sociétés ;
- Les opérations portant sur des immeubles, des fonds de commerce ou des actions ou parts de sociétés immobilières et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l’impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux ;
- (Abrogé) ;
- Les opérations visées au 8° du I de l’article 35 ;
- Les contribuables dont tout ou partie des biens affectés à l’exploitation sont compris dans un patrimoine fiduciaire en application d’une opération de fiducie définie à l’article 2011 du code civil ;
- i) Les contribuables qui exercent une activité occulte au sens du deuxième alinéa de l’article L. 169 du livre des procédures fiscales.
- j) Les contribuables qui perçoivent des revenus d’un fonds de placement immobilier imposables dans les conditions définies au e du 1 du II de l’article 239 nonies.
- Les contribuables concernés portent directement le montant du chiffre d’affaires annuel et des plus ou moins-values réalisées ou subies au cours de cette même année sur la déclaration prévue à l’article 170.
- Les entreprises placées dans le champ d’application du présent article peuvent opter pour un régime réel d’imposition. Cette option doit être exercée dans les délais applicables au dépôt de la déclaration prévue à l’article 170 souscrite au titre de l’année précédant celle au titre de laquelle cette même option s’applique. Toutefois, lorsque de telles entreprises étaient soumises de plein droit à un régime réel d’imposition au titre de la période précédant celle au titre de laquelle elles sont placées dans le champ d’application du présent article, elles exercent cette option dans les délais applicables au dépôt de la déclaration souscrite au titre de l’année au titre de laquelle l’option s’applique. En cas de création d’entreprise, l’option est exercée dans les délais applicables au dépôt de la déclaration souscrite au titre de l’année de la première période d’activité.
L’option pour un régime réel d’imposition est valable un an et reconduite tacitement chaque année civile pour un an. Les entreprises peuvent renoncer à cette option dans les délais applicables au dépôt de la déclaration souscrite au titre des résultats de l’année précédant celle au titre de laquelle la renonciation s’applique.
- Les entreprises qui n’ont pas exercé l’option visée au 4 doivent tenir et présenter, sur demande de l’administration, un livre-journal servi au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes professionnelles, appuyé des factures et de toutes autres pièces justificatives. Elles doivent également, lorsque leur commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement, tenir et présenter, sur demande de l’administration, un registre récapitulé par année, présentant le détail de leurs achats.