Au cours de ces dernières années, un certain nombre de loueurs de meublés de tourisme est confronté au double paiement de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS). Après plusieurs jurisprudences du Conseil d’Etat, deux réponses ministérielles récentes récapitulent les règles applicables en ce domaine.
À la suite de deux arrêts défavorables du Conseil de 2023 et de 2024 (CE 15/06/2023, n° 468195 ; CE. 23/12/2024, n° 492174), les services du ministère de l’économie et des finances apportent une série de précisions administratives dans le cadre de deux réponses ministérielles publiées en juin 2025 et faisant suite aux questions parlementaires formulées par différents députés certainement interpelés par leurs électeurs.
(RM-LeGac-JOAN-3-6-2025-Meubles-CFE-THRS ; RM-Falcon-JOAN-3-6-2025-Meubles-CFE-THRS).
Tentons de décrypter les réponses apportées par les services de Bercy, sachant que les informations ne sont guère satisfaisantes (du point du vue des contribuables). L’essentiel de la problématique est de savoir si les loueurs doivent acquitter la taxe d’habitation alors que les biens loués sont occupés par des locataires clients. De plus, les mêmes loueurs peuvent déjà être redevables de la cotisation foncière des entreprises. Rappelons pour mémoire que la taxe d’habitation ne vise plus les résidences principales pour ne s’appliquer que pour les résidences secondaires (ou assimilées).
D’emblée, le ministère des finances affirme ainsi que la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THRS) est en principe due pour tous les locaux meublés d’habitation autre qu’à titre principal, même s’ils sont par ailleurs imposables au titre de la cotisation foncière des entreprises (CFE).
Il résulte des dispositions du code général des impôts qu’un logement meublé, loué et qui ne constitue pas la résidence principale du contribuable peut être imposable à la fois à la CFE et à la THRS. L’argument du paiement de la CFE pour revendiquer l’inapplication de la THRS est donc irrecevable.
1. Des critères restrictifs d’exonération de la taxe d’habitation
Selon le ministère, seuls les locaux faisant l’objet d’un usage exclusivement professionnel ne sont pas soumis à la THRS (art. 1407 du CGI). Dans ce cadre, et conformément à la jurisprudence du Conseil d’État (CE, 15 juin 2023, n° 468195), lorsqu’au cours de l’année, des locaux sont mis en location pour de courtes durées et pour des périodes qu’il est loisible au propriétaire d’accepter ou de refuser, ce dernier est regardé, au 1er janvier de l’année d’imposition, comme entendant en conserver la jouissance ou la disposition. Ainsi, l’activité de location saisonnière via des plateformes en ligne entraine l’imposition à la THRS des logements concernés.
Toujours selon les services ministériels :
« L’habitation personnelle s’entend comme tout local occupé par le contribuable ou dont il se réserve l’usage comme habitation principale ou secondaire. Lorsqu’au cours de l’année, des locaux meublés sont mis en location pour de courtes durées et pour des périodes qu’il est au soin du propriétaire d’accepter ou de refuser, ce dernier est regardé, au 1er janvier de l’année d’imposition, comme entendant en conserver la jouissance. Dans ce cas, il est donc soumis à la THRS. Lorsque le propriétaire donne en location saisonnière un bien, il doit le déclarer en ligne. Si le propriétaire indique en conserver la jouissance, il est imposé de la THRS, selon les modalités d’imposition en vigueur depuis 2023 ».
Plus précisément, les réponses ministérielles indiquent :
Si un redevable demande à être dégrevé de la THRS, il doit établir qu’il a mis en location son bien pour l’année entière et n’a pas pu en disposer en dehors de ces périodes. Cette démarche est soumise à des critères exigeants, puisqu’elle est soumise à l’existence d’un engagement juridiquement contraignant empêchant le propriétaire de disposer du bien à quelque moment de l’année que ce soit.
Ainsi, il doit produire, pour chaque année et pour chaque bien loué :
– l’éventuelle déclaration de la mise en location meublée du bien auprès de la commune ;
– un décompte des jours de location effectués auprès de chacune des plateformes numériques utilisées et un récapitulatif des locations, ce qui permet souvent que la taxe de séjour correspondante soit collectée et reversée à la commune par la plateforme de réservation habilitée par le propriétaire à percevoir cette taxe ;
– le mandat de location ou la convention conclue avec chaque prestataire de services en ligne, signé avant le début de l’année d’imposition, pour déterminer l’intention du propriétaire au 1er janvier ;
– tout autre justificatif permettant d’établir que le propriétaire a entendu dédier son bien exclusivement à la location meublée de courte durée pour toute l’année.
Ces éléments seront rappelés aux services de la direction générale des finances publiques (DGFIP) qui seront amenés à traiter les réclamations contentieuses.
2. Des exonérations possibles des impôts locaux selon l’appréciation des collectivités (le plus souvent en manque de ressources)
Les réponses ministérielles précitées rappellent les exonérations possibles qui dépendent de l’appréciation des collectivités :
– en premier lieu, les personnes qui louent en meublé des locaux, classés ou non, sont exonérées de CFE, lorsque ces locaux sont compris dans leur habitation personnelle (principale ou secondaire) sauf délibération contraire de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) doté d’une fiscalité propre (CGI, article 1459, 3°). Ainsi, l’assujettissement à la CFE résulte d’une libre décision des collectivités locales concernées ;
– en deuxième lieu, dans les zones France ruralités revitalisation (FRR), entrées en vigueur le 1er juillet 2024, les communes et EPCI peuvent également, conformément à l’article 1466 G du CGI, exonérer de la CFE les activités qui se créent sur leur territoire, dont les activités de location de meublés de tourisme. L’exonération s’applique pendant cinq ans sur la base nette imposée au profit de chaque commune ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, à compter de l’année qui suit la création de l’établissement ou de la deuxième année qui suit celle au cours de laquelle l’extension est intervenue. ;
–en troisième lieu, dans les FRR, les communes peuvent, sur délibération (CGI, article 1414 bis), exonérer de THRS les meublés de tourisme classés.
Tableau de synthèse
Type de locations
| THRS | CFE |
Meublés autre que résid. principale avec mandat de gestion exclusif | Exo | Due sauf vote exo possible de 5 ans dans les ZFRR |
Meublés autre que résid. principale sans mandat de gestion exclusif | Due sauf vote exo possible dans les ZFRR | Exo sauf vote supp par collectivité |
Meublés résidence principale | Exo | Exo sauf vote supp par collectivité |