72. Annulation par le Conseil d’Etat des commentaires administratifs concernant le micro-BIC pour les revenus de meublés de tourisme

Par un arrêt du Conseil d’Etat du 8 juillet 2024, les commentaires de l’administration fiscale concernant le régime du micro-BIC applicable à certaines locations de meublés de tourisme sont en partie remis en cause (CE, 8/07/2024, n° 492382).

Le régime fiscal des meublés de tourisme n’en finit pas de péripéties et de rebondissements. Le dernier événement résulte de l’arrêt du Conseil d’Etat en date du 8 juillet 2024 qui a annulé une partie des commentaires de l’administration fiscale. Celle-ci avait décidé sur injonction du Gouvernement (de l’époque, soit en février 2024) de ne pas appliquer la loi de finances pour 2024.

Rappelons brièvement le contexte et l’enchainement des différentes étapes :

1- d’une façon générale, les pouvoirs publics souhaitent restreindre l’intérêt du régime fiscal du micro-BIC en limitant les plafonds de recettes et les abattements forfaitaires qui caractérisent ce régime fiscal simplifié (soit historiquement un abattement de 50 % jusqu’à 77 700 € de recettes annuelles pour les meublés de tourisme non classés et un abattement de 71 % jusqu’à 188 700 € de recettes annuelles pour les meublés de tourisme classés) ;

2- afin de mettre en œuvre la restriction de ce régime du micro-BIC, le Gouvernement en place en 2023 avait prévu l’adoption d’un amendement au sein de la loi de finances pour 2024 qui limitait le champ d’application de ce régime fiscal par une diminution modérée des plafonds de recettes ;

3- insatisfait du dispositif proposé par le Gouvernement, le Sénat avait adopté un contre-amendement plus restrictif que l’amendement prévu par le Gouvernement ;

4- en raison d’une erreur de procédure lors de l’adoption définitive de la loi de finances pour 2024, l’amendement du Sénat a été finalement adopté en prévoyant un abattement de 30 % (au lieu de 50 %) avec un plafond de recettes annuelles de 15 000 € (au lieu de 77 700 €) s’agissant des revenus des locations meublées de tourisme non classés (article 45 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 modifiant l’article 50-0 du CGI). Notons que le régime du micro-BIC avec l’abattement de 71 % dans la limite de 188 700 € de recettes annuelles applicable aux locations meublées classées n’est pas remis en cause ;

5- par une instruction fiscale publiée au sein du Bulletin officiel des finances publiques (BOFIP), le Gouvernement a précisé qu’il ne serait pas fait application pour les revenus de 2023 de la loi de finances pour 2024 (BOI-BIC-CHAMP-40-20). Autrement dit, selon les prescriptions gouvernementales, les loueurs de meublés de tourisme non classés bénéficieraient encore de l’abattement de 50 % avec un plafond de recettes de 77 700 € (en lieu et place d’un abattement de 30 % avec un plafond de recettes de 15 000 € tel que prévu par la loi selon l’amendement du Sénat) ;

6- après cette publication du BOFIP, plusieurs sénateurs et organismes professionnels du secteur de l’hôtellerie ont saisi le Conseil d’Etat afin d’obtenir l’annulation de ces commentaires administratifs en invoquant leur illégalité ;

7- en dernier lieu, le Haut Conseil annule ces commentaires administratifs en indiquant que si les bénéficiaires de revenus entrant dans le champ de ces dispositions, ont eu la possibilité d’appliquer, pour la détermination de leurs bases d’imposition au titre de 2023, les dispositions de l’article 50-0 du code général des impôts dans une rédaction qui n’était plus applicable auxdits revenus, par l’effet de la modification législative, l’administration a incompétemment ajouté à la loi.

Au final, les modalités d’imposition des revenus de 2023 concernant les revenus des locations de meublés de tourisme non classés ne sont pas remises en cause même si leur fondement juridique est illégal.

Après l’annulation par le Conseil d’Etat des commentaires du BOFIP, la loi en vigueur à ce jour prévoit les modalités d’application suivantes :

– le régime micro BIC est applicable aux revenus des locations de meublés de tourisme non classés dans la limite annuelle de recettes de 15 000 € avec un abattement forfaitaire de 30 % ;

– ce même régime micro BIC est mis en œuvre pour les locations de meublés de tourisme classés dans la limite annuelle de 188 700 € de recettes avec un abattement forfaitaire de 71 % ;

– ce régime forfaitaire est applicable aux locations de meublés de tourisme classés situés dans certaines zones rurales avec un abattement de 92 % dans la mesure où le montant des recettes annuelles ne dépasse pas 15 000 €.

Ce dispositif est sans aucun doute provisoire. Il devrait certainement être appliqué au titre des revenus de 2024 déclarés en 2025.

Rappelons enfin que la proposition de loi sur le tourisme qui était sur le point d’être adoptée est définitivement passée à la trappe avec la dissolution de l’Assemblée nationale.

Pour plus tard, le sort des loueurs de meublés de tourisme qui font application du régime fiscal du micro-BIC est intimement lié aux rebondissements politiques actuels.

Cet article a 2 commentaires

  1. Jean

    Merci pour ces explications dans l’attente d’une clarification des services de l’Etat et de nos parlementaires.

  2. Armandb

    Bonjour
    Tout d’abord merci pour la qualité de vos articles,

    lorsque vous indiquez :  » le régime micro BIC est applicable aux revenus des locations de meublés de tourisme non classés dans la limite annuelle de recettes de 15 000 € avec un abattement forfaitaire de 30 % ; »
    Cela sous-entend que, au-delà de 15 000 € en non classé, la personne LMNP passerait en LMP ? Ou alors, quel abattement devra-t-elle appliquer ensuite ?
    En vous remerciant,

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